Article paru en Juillet 2017 dans le magazine:
« Sophrologie, Pratiques et Perspectives » (n°16)
Dans cette article j’aborderai les sujets suivants :
- Qu’est-ce que n’est pas la bienveillance
- A quoi reconnaît-on qu’une personne est bienveillante ?
- Comment développer la bienveillance ?
On a souvent tendance à confondre « bienveillance et gentillesse ». Ce n’est pourtant pas la même chose ! Sur le plan phénoménologique, il s’agit d’être présent à soi, de porter un regard neuf sur soi, les autres, le monde. Cela implique d’être clair avec soi-même, d’être en mesure de déterminer ses besoins et ses désirs, de savoir verbaliser ses demandes afin d’éviter les malentendus.
Tout d’abord, quelques synonymes à la bienveillance : compréhension, cordialité, indulgence, prévenance, sympathie, amabilité … Tous ces mots recouvrent des manières d’être avec les autres. Ainsi la bienveillance implique un lien affectif qui met en œuvre notre capacité à apprécier les autres, voire à les aimer. Nous sommes bien dans le registre de l’émotion, de l’empathie.
Je me souviens d’un congrès auquel j’assistais en tant qu’étudiante en sophrologie, où je me suis demandée alors si les intervenants qui nous faisaient part de leurs recherches et réflexions, étaient véritablement congruents, et s’ils appliquaient au quotidien ce qu’ils disaient concernant la « présence à soi ». Forte de cette interrogation au volant de ma voiture je tâchais d’être plus présente à moi et à mon environnement, lorsque j’aperçus au passage pour piétons une personne qui attendait sous la pluie qu’une voiture daigne vouloir s’arrêter. Je me suis arrêtée en me disant que si j’avais été à la place de cette personne, j’aurais aimé qu’on me voit et que l’on m’invite simplement à traverser ; la personne eut alors un large sourire dans ma direction. Depuis ce jour-là, lorsque j’aperçois un piéton à un passage, je prends plaisir à m’arrêter en me disant que grâce à ce geste, cette personne passera une bien meilleure journée, et cela pourra contribuer à changer son regard sur le monde. Je venais de comprendre ce qu’était la bienveillance au quotidien !
La bienveillance serait donc d’être en capacité de me mettre à la place de l’autre et de me demander ce que j’aurais aimé qu’on fasse pour moi dans cette situation.
Qu’est-ce que n’est pas la bienveillance ?
La bienveillance ce n’est pas un sourire en toutes circonstances, en manifestant toujours une émotion identique, sans colère et sans opposition. Sous prétexte de bienveillance, il faudrait prendre sur soi pour ne pas faire de vagues ! La bienveillance ce n’est pas dire « oui » à tout et à tout le monde, car ce serait vivre dans le déni de la « malveillance ». Ce n’est pas non plus vouloir être aimé à tout prix et par tout le monde : il est nécessaire de travailler cette congruence, afin qu’elle devienne une manière d’être, une philosophie de vie.
Il s’agit d’avoir travaillé son affirmation de soi, d’être en mesure de savoir dire « non » et de défendre ses idées et ses valeurs. Avoir du courage, même s’il faut se retrouver seul(e) contre tous ! C’est dans l’adversité que l’on peut mesurer cette bienveillance.
La bienveillance c’est comme l’effet papillon, elle donne envie, elle est contagieuse, elle se propage pour un monde plus intègre et meilleur, c’est un véritable « cercle vertueux ».
Très vite s’impose à moi cette citation biblique « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Et si l’on ne s’aime pas on fait comment ? C’est le fruit d’un travail sur soi, et de supervision pour un professionnel qu’est le sophrologue, ce temps de découverte de soi, de ses manques, de connaissance de ses besoins et la capacité à les satisfaire, c’est avant tout ressentir cette bienveillance envers soi-même, s’aimer au fond !
Bienveillance ou « bien-veillance » pourrait presque se traduire par « bon regard ». Dans certaines cultures on fait l’analogie avec un « bon présage ». A l’inverse, on va parler du « mauvais œil », qui est à l’opposé de la bienveillance.
A quoi reconnaît-on qu’une personne est bienveillante ?
La bienveillance va se lire à travers les messages du corps, dans les expressions, les attitudes, les regards ; c’est le corps qui parle et qui va donner ces informations, « le non-verbal, cet Inconscient corporel ».
En sophrologie, on abordera la bienveillance par le biais de la phénoménologie, en faisant « des arrêts sur image », comme un regard d’enfant qui se pose pour la première fois sur l’environnement, avec une acceptation large et spontanée. On parlera alors d’intentionnalité bienveillante ! Cela rejoint l’un des principes d’Hippocrate : « tout d’abord ne pas nuire ».
La sincérité, l’élan du cœur, une autre façon d’être au monde, la coopération, la fraternité, Carl Gustav Jung nous disait à l’époque « c’est une quête de l’unité en connexion du grand tout ».
Comment développer la bienveillance ?
Prendre un temps dans ma respiration et porter un regard bienveillant sur soi-même, sur son environnement, sur le monde. Je « respire l’autre », je le regarde comme s’il était quelqu’un de ma famille. La personne se sent alors reconnue en tant que personne, parce qu’elle est vue, elle se sent respectée, non jugée, la communication est alors possible ! Une communication laissant une grande place à l’Amour !
Je vous propose une séance de sophrologie pour ouvrir à plus de bienveillance :
Vous pouvez faire cette séance là où vous vous trouvez, que vous soyez assis dans un moyen de transport bus, train, salle d’attente, debout en train de cuisiner, ou d’attendre le bus, ou bien même allongée sur une belle plage avec la mer en face de vous…
« Prenez conscience de vos contacts… pieds, jambes, dos, tête, prenez doucement une respiration profonde et ample en ressentant la fraicheur de l’air qui entre et qui caresse vos narines, puis l’air qui ressort légèrement réchaufé par votre intériorité, seul compte cet instant, que vous vivez pleinement dans une présence à vos sensations, émotions, pensées sans s’arrêter sur quoi que ce soit, comme des petites bulles d’air qui s’envolent, bercées par votre souffle, je savoure le mouvement de ma respiration,… A cet instant la chose la plus importante qui me remplit de bonheur ! Je suis tout en présence à mes sensations corporelles, sans jugement, ni critique, ni bien ni mal, ni agréable ni désagréable, juste être là ! Je laisse mes pensées défiler devant moi, sans m’arrêter sur aucune… je ressens mon corps dans sa vivance, son énergie comme la sève d’un arbre qui circule paisiblement, je ressens la chaleur de cette sensation qui m’ouvre à une joie grandissante, de la vie qui circule dans mes veines, je ressens une bienveillance qui prend naissance dans mon ventre, et qui me donne le sourire, mon corps fabrique de la vie, de la vie inédite, dans l’instant présent… mes yeux s’ouvrent comme pour la première fois sur mes sensations, je remercie mon corps, comme un(e) ami(e) pour ce cadeau qu’il me fait. Merveilleuse présence à soi, à mon environnement, au monde des odeurs, parfums, sons, saveurs, sensations de ma peau, chaleur ou fraicheur… je suis en osmose avec la Nature, avec le Monde, avec l’Univers…Une bouffée de bienveillance m’envahit et me remplit… je suis cet enfant qui ouvre les yeux pour la première fois sur son environnement, s’en amuse, avec cette curiosité pétillante et bienveillante !
Merci, merci, merci… »
Je ne peux conclure sans évoquer tous les champs où se déploie la bienveillance, et qui mériteraient qu’on y consacre pour chacun un article tout entier, la bienveillance au travail ou au sein des associations, entre parents et enfants ou dans l’éducation à l’école, dans le couple, en politique, dans l’environnement…
Et si au fond nous n’aspirions qu’à cette humanité, une bienveillance qui nous permettrait de vivre dans le respect de nos différences, ou tout au moins de faire sa part comme le « colibri » en référence à un conte amérindien raconté par Pierre Rabhi :
« Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés et atterrés observaient, impuissants, le désastre. Seul le petit colibri s’active, allant chercher quelques gouttes d’eau dans son bec pour les jeter sur le feu. Au bout d’un moment, le tatou, agacé par ses agissements dérisoires, lui dit : « Colibri ! Tu n’es pas fou ? Tu crois que c’est avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ? » « Je le sais, répond le colibri, mais je fais ma part.
Par Isabelle Fontaine