Cas clinique : Odile et ses fantômes

sophrologie pratiques et perspectives n°19 avril 2018

Article paru en Avril 2018 dans le magazine:
« Sophrologie, Pratiques et Perspectives » (n°19)

Odile, jeune lycéenne de 17 ans, m’est envoyée par son médecin traitant. Elle vient avec sa mère. Elle présente des malaises depuis quelques mois à type d’hypoglycémies, et des angoisses.

Elle a déjà été vue par une psychiatre, qui lui a prescrit des anti-dépresseurs, qu’elle n’a pas souhaité prendre.

Elle est actuellement sous anxiolytique et polyvitamines.

Je reçois Odile en consultation, jeune fille hypersensible, inquiète quant à son état. Elle ne va plus en cours, car systématiquement elle se retrouvait à l’infirmerie pour tremblements, fourmillements dans les pieds, claustrophobie. Elle me dit qu’elle pleure tout le temps, elle fait des crises d’angoisse qui l’enferment un peu plus chaque jour.

Mon diagnostic : terrain spasmophile, confirmé par le questionnaire de spasmophilie. Anxiété importante avec claustrophobie, agoraphobie et phobie sociale. Manque de confiance en soi.

Anamnèse : Parmi les questions que je me pose : n’est-elle pas en phase de décompensation, due à un événement traumatisant ? Je lui pose des questions sur sa façon de s’alimenter et notamment le petit déjeuner. Quelles sont ses sensations physiques quand elle fait un malaise générateur d’angoisse avec perte de connaissance ? Depuis quand sont apparues ces manifestations ? est-ce contemporain d’un événement traumatisant ?

Elle me répond qu’elle ne prend pas de petit déjeuner, et elle est surtout attirée par les aliments sucrés. Lors des malaises elle ressent d’abord des fourmillements dans les pieds, qui l’inquiètent beaucoup, avec sensation de mort imminente, hyperventilation. Ces malaises sont apparus quelque temps avant les épreuves du bac de Français. J’apprendrai par la suite qu’il y a eu une grave dispute familiale. Ces symptômes apparaissent régulièrement en classe et aussi lors de ses loisirs, shopping, amis, etc…, où son agoraphobie l’oblige à rebrousser chemin. Ses peurs nocturnes obligent désormais sa mère à venir dormir avec elle dans son lit.

 

Le protocole que j’applique :

 

  1. Je précise à Odile que la place de sa mère n’est pas dans son lit, et qu’elle va devoir mettre en place un autre comportement pour gérer ses peurs nocturnes.
  2. Concernant son alimentation, je l’aide à mettre en place une hygiène alimentaire correcte pour supprimer les épisodes d’hypoglycémie.
  3. Travail sur la respiration, avec entrainement régulier et prise de conscience des moments de début de l’angoisse : respiration lente et profonde, en position debout, et prise de conscience de sa posture en RD1.
  4. Je lui propose d’écrire les images qui lui viennent en tête lors des épisodes d’angoisse.
  5. Je lui propose d’écrire dans un joli carnet choisi pour cette occasion, ses sensations désagréables lorsqu’elles surviennent et de m’écrire un SMS en dernier recours quand elle est dans un comportement d’évitement insurmontable, afin de l’aider à extérioriser et mettre à distance son angoisse. Je lui réponds systématiquement dans un délai raisonnable.

Evolution : elle surmonte ses angoisses, elle n’est plus dans l’évitement, elle en est satisfaite, elle augmente son estime de soi. Les épisodes d’angoisse sont espacés, elle utilise maintenant de nouvelles ressources corporelles et sa respiration de façon adaptée. Elle a repris une scolarité régulière et il n’y a plus de crises d’angoisse invalidantes. Elle s’alimente mieux et a repris du poids, elle est plus dynamique et entreprenante dans le milieu familial et amical. Bien entendu sa mère ne dort plus avec elle.

Elle apprend à mieux reconnaître ses émotions et à les gérer.

Afin de préparer le bac, j’ai mis en place avec elle une sophro-acceptation progressive. C’est une succession de séances spécifiques, où elle vit dans l’après bac une prise de conscience progressive de l’examen déjà passé, par la répétition du scénario.

Elle est même devenue experte de l’anxiété auprès de ses amies. Une sophrothérapie se poursuit afin de mieux gérer l’événement traumatisant initial.

 

Par Isabelle FONTAINE

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